Des usages inattendus d’un dispositif institutionnel : Mises en valeur de l’interstice clinique
Que vient faire une personne dans un lieu de soin ? En nous penchant sur cette question, nous mettons en évidence un triple interstice irréductible, structurant toute pratique clinique. Une disjonction surgit entre mandat institutionnel et subjectif, entre une prise en charge axée autour de son but ou de sa cause et, entre ce que l’un croit dire, ce qu’il dit et encore, ce que l’autre entend.
Nous émettons l’hypothèse que ce triple interstice est clinique, c’est-à-dire qu’il constitue une opportunité de mise au travail. Nous mettons cette hypothèse à l’épreuve du terrain via deux constructions de cas issues de notre recherche dans deux institutions de rééducation fonctionnelle aux indications différentes.
Au confluent des contraintes institutionnelles et subjectives, nous examinons les usages que font ces deux sujets des dispositifs institutionnels. Il en ressort que l’usage singulier est la règle, inhérent à la logique de chaque cas, puisque toute institution est inadaptée à un sujet qu’elle n’a pas encore rencontré. Il en ressort aussi que leurs difficultés, épinglées comme fonctionnelles, découlent des difficultés qu’ils rencontrent dans le lien à l’autre. Ces sujets viennent, contrairement à ce qui est prévu par les mandats institutionnels, soigner ce lien ce qui, dans une boucle rétroactive, a un effet d’apaisement sur leur propre personne.
Dans la rencontre clinique, un pari raisonnable est donc à faire en accueillant l’inattendu. Loin de constituer un frein, les interstices que nous mettons en exergue, si nous y prenons garde, soutiennent la constitution d’une institution trouée protéiforme, c’est-à-dire qui se prête aux multiples usages qu’en font les sujets qui s’en saisissent. Il s’agit donc de soutenir un cadre tel qu’il puisse soutenir en retour les façons qu’a le sujet d’y prendre appui.
Mots-clés
- usage
- fonction
- dispositif institutionnel
- interstice
- clinique