Torture et temporalité

Contribution à une sémiologie de « psychose traumatique »
Par Philippe Bessoles
Français

Résumé

Les traumatismes issues des tortures génèrent une sémiologie proche des psychopathologies psychotiques. Nous proposons, à la suite des travaux de S. Férenczi (1937), B. Bettelheim (1960), L. Bailly (1989) et F. Sironi (1999) une contribution à la notion de « psychose traumatique » à partir de la clinique des victimes de torture. La destruction des liens psychiques, sociaux, familiaux, culturels... caractérise l'anéantissement victimaire des personnes torturées. La symptomatologie d'apparence anxio-dépressive cache mal les angoisses agoniques, les sentiments de persécution, les retraits d'allure catatonique ou stuporeuse, les troubles de l'image du corps et, d'une façon générale les atteintes des bases narcissiques. La torture crée un lien agglutiné (J. Bléger, 1981) à la scène traumatique mais surtout au tortionnaire au travers de la pulsion d'emprise. La victime est sous influence y compris dans sa temporalité qui ne cesse de répéter, dans les reviviscence, les « figures de l'horreur ». La torture hypothéque les liens de filiation et d'affiliation par ses actes de violences sexuelles, de génocide, d'épuration ethnique ou déplacement de population. Détruire la sensorialité est la « technique » des tortionnaires dont l'ultime fin est la dépersonnalisation prise en otage entre « parle, sinon on continue » et « si tu parles, on recommence ».

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