Après le génocide, régénérer l'« entre générations » pour naître à soi

Traumas collectifs et transmission
À partir d'une recherche-action avec des mères rescapées et leurs enfants adolescents au Rwanda
Par Jeannette Uwineza, Jean-Luc Brackelaire
Français

Les jeunes sont nombreux au Rwanda à devoir « remonter le temps » (Altounian, 2013) et entreprendre un « retour à la fracture de l’existence » (Masson, 2004) pour retrouver l’héritage d’une famille perdue en même temps qu’ils accèdent à eux-mêmes. En instituant et partageant l’espace de l’« entre générations », ceux qui sont prêts à repartir des valeurs d’avant et à les régénérer leur donnent accès à un autre héritage, de l’ordre de l’humain. Le transgénérationnel désigne ici le principe et le processus mêmes de création et recréation du rapport entre générations et donc de la transmission. Il permet de poser et d’affronter la question de savoir comment émerge, réémerge, après le génocide, une structuration et une organisation personnelles et sociales entre générations, qui soit de l’ordre du rapport bilatéral de la responsabilité, de l’obligation, de la loi. Les auteurs développent leur propos à partir d’une recherche-action entreprise depuis septembre 2010 et visant la création d’espaces de réparation psychique pour des mères rescapées et leurs enfants adolescents. Le cas de Peace, « enfant de tout le monde et de personne, de partout et de nulle part », montre comment il incombe au sujet émergeant d’un tel contexte de se charger de la construction de son avenir, de se constituer une histoire, plutôt que de rester victime et subir l’ardeur du traumatique légué à travers les générations. L’« entre générations » vient désigner un point d’appui et de relance essentiel dans cette tâche considérable.

Mots-clés

  • parent-enfant/adolescent
  • transmission
  • entre générations
  • transgénérationnel
  • génocide
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